L’affaire catalane appelle quelques réflexions :
1/ « La nation, c’est la volonté de vivre ensemble » (E. Renan)
Pour Ernest Renan, la référence incontournable des républicanistes, c’est le « consensus » qui fonde les vraies nations, « c’est la volonté de vivre ensemble » ; la nation est un principe spirituel, « c’est un plébiscite de tous les jours » (In Qu’est-ce qu’une nation, 1882). Ces considérations s’appliquent notamment aux Etats ethniquement composites comme la France ou l’Espagne.
Or, comme c’est le cas en Catalogne, dès lors que ce « consensus », cette « volonté de vivre ensemble », n’existent plus, une procédure de sortie doit être envisagée !
Le « droit de divorcer » doit être reconnu à toutes les composantes constitutives de l’Etat qui, à un moment donné de l’histoire, se sont retrouvées amalgamés, souvent par la violence du plus fort, en « nation ». L’autodétermination n’est autre chose qu’un « droit à la sortie » !
Si le droit de divorcer est reconnu aux couples, de la même manière il ne peut être refusé aux peuples. Et si l’Etat, comme c’est le cas de l’Espagne, refuse ce droit à une minorité, il devient de facto une prison pour les peuples !
2/ Pour bien comprendre la duplicité de la France qui aujourd’hui soutient Madrid dans son refus d’accorder le droit à l’autodétermination des Catalans, il suffit de se remémorer l’épisode du référendum d’indépendance du Québec en 1995. La France soutenait alors de tout son poids les indépendantistes Québécois. Partout, la diplomatie française s’activait pour expliquer que le droit à l’indépendance était un droit intangible, un droit sacré ! Le président français Jacques Chirac était d’ailleurs persuadé que les indépendantistes francophones du Québec allaient l’emporter. En cas de victoire du oui, Jacques Chirac disposait déjà d'une réponse toute prête : « La souveraineté du Québec est un état de fait qui ne demande désormais qu'un habillage juridique ». Cette déclaration est restée dans un tiroir après l’échec du oui. (http://www.huffingtonpost.fr/frederic-pennel/3-raisons-pour-lesquelles-lindependance-du-quebec-nest-toujour_a_23045057/).
On le voit ici, le droit à l’indépendance dénié aux Catalans par Madrid appuyée en cela par Paris est pourtant reconnu, voire même porté aux nues, par la France dès lors qu’il s’agit de minorités francophones.
Citons un autre exemple de ce double langage de la France. Dans les années 1970, quand les jurassiens suisses francophones décident de faire sécession pour créer leur propre canton en se fondant sur le droit à l’autodétermination, la France soutient le mouvement « Jura libre »… y compris financièrement (ce qui exaspéra Bern).
A Paris, on exulta quand le référendum accordé par Bern donna l’avantage aux séparatistes, avec pour conséquence la création d’un nouveau canton francophone, celui du Jura (1.1.1979).
3/ Daniel Cohn-Bendit clame sur tous les micros que l’indépendance de la Catalogne est impossible, qu’elle mènerait à une « nouvelle guerre en Espagne » et que son entrée dans l’Europe serait irréalisable ! Pour finir, il envoie tout le monde dos à dos : « Rajoy est fou et les indépendantistes catalans sont fous », a-t-il déclaré au micro de France Inter le 1.10.2017. Or, le même, en juillet 2017, préconisait pourtant l’entrée de la province francophone du Québec dans l’Union Européenne : « L’indépendance du Québec passe par l’adhésion à l’Union Européenne », a-t-il affirmé. (http://www.huffingtonpost.fr/2017/07/18/pour-daniel-cohn-bendit-le-quebec-devrait-entrer-dans-leurope_a_23035199/?utm_hp_ref=fr-quebec).
Donc, pour Daniel Cohn-Bendit, si l’entrée dans l’UE de la province canadienne du Québec ne poserait pas de problème, en revanche, elle serait impossible pour un Etat européen comme la Catalogne indépendante ! Aucune cohérence !!
4/ Après le refus de Bruxelles d’exercer une quelconque médiation dans la crise catalane et sa condamnation de l’indépendantisme catalan - alors qu’elle soutint la sécession du Kosovo en 2008 -, elle ne pourra plus jouir d’aucune crédibilité dans le monde quand elle prétendra vouloir défendre la liberté, les valeurs démocratiques et le droit à l’autodétermination des peuples. Déjà le 2.10.2017, le président de la Serbie Aleksander Vucic a dénoncé à la télévision serbe « l’hypocrisie » et le « deux poids deux mesures » de l’UE : « Comment se fait-il que, dans le cas de la Catalogne, le référendum d'indépendance ne soit pas valide, mais qu'à ses yeux la sécession du Kosovo, pourtant organisée sans référendum, le soit ?», s'est-il interrogé (1).
Bernard Wittmann – 7.10.2017
(1) https://francais.rt.com/international/44102-catalogne-kosovo-serbie-denonce-hypocrisie-occident
Aujourd’hui est un jour de deuil pour la démocratie en Espagne.
Ce dimanche 1er octobre 2017, nous voyons sur les chaînes infos le spectacle déplorable en Catalogne de militaires armés empêchant par la force un peuple pacifique de s’exprimer démocratiquement sur son sort. Un spectacle affligeant, révoltant digne de la période franquiste ! La voix d’un peuple qui veut s’exprimer ne peut pas être « anticonstitutionnelle », comme le prétend Madrid.
L’Espagne ne s’est pas conduit comme un pays démocratique. Citons en contre-exemple, la Grande Bretagne qui a autorisé un référendum sur l’indépendance de l’Ecosse ou le Canada sur celle du Québec - aucun de ces deux référendums n’a d’ailleurs abouti à l'indépendance -, ce sont là des modèles démocratiques !
Ce qui se passe à Barcelone est une honte pour toute l’Europe ! Bruxelles laisse faire et se tait lamentablement. Pire, en France le président Macron assure Rajoy, qui ne connait que la « diplomatie du panzer », de son soutien. Or, comment peut-on encore croire en l’Europe, si elle n’intervient pas dans ce type de situation où des droits fondamentaux sont foulés aux pieds dans un pays membre ?
A Barcelone, l’Europe a laissé enterrer ses valeurs, elle ne pourra donc plus s’en revendiquer à l’avenir.
Mais les Catalans sont déterminés. Plus que jamais, ils vont revendiquer le droit de s’autodéterminer, un droit reconnu par des instances internationales comme l’UNESCO ou l’ONU (Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme). Ainsi, l’article 1 du « Pacte international des Nations unies relatif aux droits civils et politiques des minorités religieuses, ethniques et linguistiques », énonce clairement dans son article premier « le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles ».
Un arrêt de la Cour internationale de La Haye (22.7.2010), de première importance dans l'affaire catalane, explique : "...aucune règle interdisant les déclarations unilatérales d'indépendance n'existe en droit international (…) lorsqu'il y a une contradiction entre la légalité constitutionnelle d'un état, et la volonté démocratique, cette seconde prévaut…" (1). Au regard de cet arrêt, l’argument avancé par Madrid de l’anti-constitutionnalité du référendum catalan tombe tout simplement !
Ce qui se passe en Catalogne marque bien le début de la fin des Etats-nations.
…Et chapeau aux Catalans, ils sont à présent plus déterminés que jamais !
Bernard Wittmann – Historien -1.10.2017
(1) A propos de la déclaration d‘indépendance du Kosovo :
ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA HAYE
La Cour internationale de justice de La Haye, principal organe judiciaire de l'organisation des Nations Unies, a établi à cet égard, par jugement du 22 juillet 2010 :
" Nous déclarons qu'aucune règle interdisant les déclarations unilatérales d'indépendance n'existe en droit international. Nous déclarons que lorsqu'il y a une contradiction entre la légalité constitutionnelle d'un état, et la volonté démocratique, cette seconde prévaut, et nous déclarons que, dans une société démocratique, contrairement à une dictature, ce n'est pas la loi qui détermine la volonté des citoyens, mais c'est elle qui crée et modifie la légalité en vigueur ".
Courrier de lecteur dans les DNA: http://www.dna.fr/politique/2017/10/07/jour-de-deuil-pour-la-democratie-en-espagne
Catalogne : le coup de force de Madrid digne d’un Etat totalitaire !
Un des principes fondamentaux des démocraties régulièrement mis en avant par les dirigeants de la plupart des pays de la planète, vient d’être foulé aux pieds par le gouvernement de Madrid. Ce dernier entend s'opposer par la force à l'organisation d'un vote démocratique des Catalans appelés à se prononcer sur leur indépendance.
En effet, "l'autodétermination des peuples" figure toujours à l'ordre du jour des Nations Unies et dans les professions de foi de la plupart des dirigeants européens voire du monde. Et la décision d'un juge invoquée par Madrid pour justifier l'arrestation de 13 membres du gouvernement légal catalan, les innombrables perquisitions à travers toute la Catalogne, la saisie de tout le matériel électoral ainsi que celle de 10 millions de bulletins de vote pour empêcher les Catalans de s'exprimer librement, n'est qu'une couverture hypocrite pour cacher un situation de force. Bruxelles, toujours si prompte à dire la règle démocratique, a le devoir de s'y opposer !
Depuis ce mercredi 20 septembre 2017, l'Espagne offre au monde l'image ignominieuse d'un Etat oppressif qui renvoie inévitablement aux heures sombres du franquisme. Après le coup ce force de Madrid digne d’un Etat totalitaire, on peut dire que l'Espagne a cessé d'être une démocratie ! Aussi, soyons solidaires des Catalans qui luttent pour la souveraineté de l’expression référendaire et le droit fondamental à l’autodétermination.
Pour l’histoire, rappelons que le 23 octobre 2016, à Madrid, ce sont les socialistes qui ouvrirent la voie du pouvoir au conservateur Mariano Rajoy, un « jacobin espagnol » bête noire des Catalans ! A présent, ils soutiennent les mesures prises pour empêcher la tenue du référendum. En 1978, alors que sous Franco on avait promis aux Basques la possibilité de créer leur propre Etat, c'est déjà le Parti Socialiste (PSOE) qui s'opposa à l'inscription du droit d'autodétermination dans la Constitution du 27 décembre 1978.
En 2015, en France, ce sont également les socialistes, via le gouvernement Valls, qui décidèrent, sans aucune consultation des Alsaciens, de la fusion-dilution de l’Alsace avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne pour former la méga-Région « Grand-Est » grande comme deux fois la Belgique. Un autre déni de démocratie !
Bernard Wittmann – 20.9.2017
FLASH BACK SUR UN RÉFÉRENDUM RATÉ :
En 2013, j'ai plaidé en faveur de la "Collectivité unique" (voir mon ouvrage titré : "L'Alsace demain : plaidoyer pour un statut d'autonomie" (éd. Yoran Embanner). Voici ce que j'écrivais alors dans un texte daté du 13.3.2013, c'est-à-dire un mois avant le référendum. J'étais alors plein d'optimisme. Mais les Alsaciens rateront une nouvelle fois le train de l'histoire : ils ne sauront pas se saisir de cette occasion qui s'offrait à eux pour s'ouvrir les voies de la responsabilisation et de l'émancipation. Le résultat fut qu'en 2015, l'Alsace se retrouvait rayée de la carte des régions !! Se rattraperont-ils aux législatives de juin 2017 en votant pour les candidats autonomistes d'Unser Land ? Wait and see ! B.W.
UNE OFFRE DE RESPONSABILISATION NE SE REFUSE PAS !
Le 7 avril 2013, pour la première fois de leur histoire, les Alsaciens pourront se prononcer sur leur avenir. Une occasion historique leur est offerte pour accéder aux voies émancipatrices de la responsabilisation et réaliser l’unification du pays. De toute façon, à l’avenir, avec une France en déclin et incapable de se réformer, les Alsaciens n’auront d’autre choix que de compter sur eux-mêmes pour s’en sortir !
D’ailleurs, les Alsaciens savent mieux que quiconque ce qui est bon pour eux. Ils sont assez matures pour gérer leurs affaires et certainement pas plus bêtes que les Enarques parisiens. Ils ont même montré qu’ils étaient plus performants qu’eux, le budget régulièrement excédentaire de notre Caisse locale d’Assurance-Maladie en témoigne.
Pas d’autonomie financière
L’Alsace a toujours été forcée de se plier aux contraintes fixées par l’extérieur et souvent contraires à ses intérêts propres (sabotage du bilinguisme). Ce projet de Conseil unique permettra aux Alsaciens de sortir (un peu) de l’état de sujétion que l’absence d’autonomie financière met le mieux en évidence. Car Paris tient toujours les cordons de la bourse : le budget de la Région découle à 83% de dotations de l’Etat, celui des département à 85%, des dotations se font souvent attendre ! Et pardessus le marché, Paris vient encore de décider de diminuer de 3 milliards d’euros les dotations aux collectivités locales en 2014 et 2015[1]. La France enfreint ainsi ses engagements fixés dans la Charte européenne de l’autonomie locale, signée et ratifiée par elle, qui garantit l’autonomie des collectivités locales et instaure une démocratie de proximité.
L’Alsace s’essouffle
Il faut en finir avec les dogmes et cette peur panique de la diversité des jacobins. Il faut déverrouiller ce système totalisant, et donc oppressif, véritable étouffoir des Région puisqu’il ne leur laisse aucune marge de manœuvre. Soumise à un tel régime, bridée et ponctionnée de partout, l’Alsace s’essouffle et entre dans un processus régressif. La croissance de son PIB est en-dessous de la moyenne nationale et son taux de progression du chômage est parmi les plus élevés de France (+11,4%[2] contre 10% moyenne nationale). Et son traditionnel bilinguisme, pourvoyeur d’emplois frontaliers, meurt victime d’une épuration linguistique visant à imposer partout le français unique !
Echec du modèle centraliste
D’ailleurs, le modèle centraliste est partout en échec : « avec le centralisme, on a l’apoplexie au centre et la paralysie aux extrémités » écrivait déjà Félicité de Lamennais. Pour mesurer son inopérance, il suffit de comparer la situation régressive de l’Alsace soumise au système centralisé et le dynamisme de la région autonome voisine du Bade-Wurtemberg : « Dans toutes les grandes démocraties, le modèle régionaliste est plus efficace que le modèle centralisé pour l’économie et l’innovation » a martelé le PS Alain Rousset, président de l’Association des Régions de France, en janvier 2013 devant ses homologues réunis en assemblée.
Le Conseil unique permettra de libérer les énergies
Le Conseil unique est gage d’économie et permettra de gagner en rationalité et en efficacité, notamment dans la dépense publique. Ses avantages sont évidents :
- un budget unique de près de 2,8 milliards d’euros permettra d’engager des politiques plus ambitieuses et sur le long terme. Il permettra notamment à la Région de piloter le redressement industriel, elle seule ayant la connaissance du terrain ;
- une Alsace unie et parlant d’une seule voix sera évidemment plus forte, notamment pour défendre notre droit local et le Concordat de plus en plus attaqués ;
- dotée des compétences nouvelles qu’autorise le cadre législatif existant, l’Alsace aura la possibilité de prendre en charge l’enseignement de son histoire et de sa langue. La connaissance de l’allemand permettra de soulager le chômage des jeunes qui pourront à nouveau trouver un travail dans le Land Bade-Wurtemberg qui est demandeur. Elle pourra aussi négocier des accords transfrontaliers avec les Régions du Rhin supérieur.
Evidemment, le Conseil Unique n’est pas la panacée et le projet, même s’il n’est pas parfait, est toujours perfectible ! Il n’est qu’une première étape. Négociées avec Paris, de nouveaux transferts de compétences, avec un financement adéquat, devront suivre. L’aboutissement sera un Parlement d’Alsace !
Le camp du « non » : une coalition de jacobins
Quant à ceux opposés au projet, leur opposition est généralement purement idéologique et leurs arguments son souvent poussifs : « le texte est flou », « l’objectif est de casser le droit du travail national », « pas de chèque en blanc à un projet opaque » (PCF), « coût du référendum » (A. Fontanel PS)…
Le camp du « non » recrute essentiellement dans les 2 extrêmes de l’échiquier politique :
- à l’extrême gauche : partis du Front de Gauche de J.-L. Mélanchon (Parti de Gauche, Gauche Unitaire, PRCF, PC, POI…) et NPA… rejoints par la CGT ;
- à l’extrême droite : le FN, sa présidente Marine Le Pen s’étant même déclarée favorable à la suppression des Régions[3] ?
Cette curieuse « coalition » jacobine a vu le ralliement de quelques socialistes Bas-Rhinois nostalgiques de la SFIO. Ces derniers sont en opposition avec ministre Arnaud Montebourg qui, lui, encourage le Conseil unique « parce que c’est intelligent »[4] !
« J’aime l’Alsace, je vote non !» est le slogan fétiche des détracteurs du projet. C’est vrai qu’ils aiment tellement l’Alsace… qu’ils préfèrent en voir deux ! Ce qui les unit, c’est l’idéologie jacobine. Ils sont les héritiers des idéologues de la Terreur qui confondaient unité et uniformité et qui avaient une vision unitaire du peuple français quasi ethniciste : « La France, pays de la diversité vaincue !» était leur slogan. Aussi, leurs arguments, destinés à faire peur, sentent-ils le rance : « Le Conseil unique est une machine à affaiblir la République » (Parti de Gauche) ; « C’est l’explosion de la France » ; le projet s’attaque aux « fondements de la République : l’unité et l’indivisibilité de la loi » (Parti de Gauche[5]), il va conduire « au détricotage de la France » (FN), etc..
Leurs arguments étaient déjà les mêmes en juin 1924, lors des débats qui précédèrent l’adoption des deux lois conférant un caractère permanent à l’ancienne législation locale : ce « droit local » va faire voler en éclat la « République Une-et-Indivisible » prévenaient-ils déjà ! Or, force est de constater que notre droit local existe depuis près d’un siècle et la France ne s’est pas effondrée (seuls les Nazis le supprimèrent durant l’Occupation) ! L’Alsace n’est d’ailleurs pas la seule Région de France bénéficiant de dispositions particulières, loin de là. À Wallis et Futuna, depuis la fin du XIXe siècle, la « République Une-et-Indivisible » reconnaît même… trois royautés coutumières !
Le débat aura donc à nouveau mis en évidence le clivage entre régionalistes et jacobins. Les premiers, partisans du partage du pouvoir, font confiance en l’homme et le placent au centre de leurs préoccupations. Les seconds, caractérisés par leur « statolâtrie », se méfient de l’homme et veulent le soumettre à un pouvoir central omnipotent.
Les clés du futur
Ce projet de Conseil unique d’Alsace est une offre de responsabilisation. Les Alsaciens, s’ils ont un tant soit peu d’intelligence collective, ne peuvent la rejeter. C’est une chance unique qui nous est offerte pour nous extirper de la sujétion et nous permettre d’affronter, unis, solidaires et forts d’une identité réaffirmée, les grands défis du siècle. D’autant qu’il n’y a pas de plan B ! Le Oui s’impose donc comme une évidence !
Bernard Wittmann – Historien
15.3.2013
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[1] In Figaro du 3.3.2013
[2] L’Alsace compte à présent plus de 88 000 inscrits à Pôle emploi (in Figaro 4.2.2013)
[3] http://www.menscom.com/uploads/files/Sondage_CSA-Menscom_avril-2011_Plus-Menscom-1-referendum.pdf
[4] DNA 11.3.2013
[5] DNA 13.3.2013 p.18
Ces élections ne changeront rien pour les Alsaciens !
Aucun des candidats n’a dénoncé le colonialisme intérieur
Ça y est ! L’investiture d’Emmanuel Macron ce dimanche marquera la fin du dernier grand psychodrame français pour l’élection du prochain monarque républicain. Elle fut marquée par la sidérante percée du FN et l’élection d’Emmanuel Macron, un homme du système et des banques simplement revêtu d’habits neufs pour donner l’illusion du changement… mais qui a néanmoins l’avantage d’être un europhile sincère.
Une élection pour rien, puisqu’au final rien ne changera, prenons-en le pari. En effet, ni le libéralisme mondialiste de Macron, ni l’enfermement nationaliste exacerbé de Marine ne peuvent être de nature à freiner le lent mais inéluctable dépérissement de la France dont les causes principales sont à chercher dans son idéologie nationale. Une idéologie fondée sur une vision totalitariste du réel, incapable d’incarner la démocratie et qui, de ce fait, finit par ne produire que des injustices et du ressentiment !
En effet, durant toute la campagne du 1er et du 2e tour, aucun des candidats n’a clairement identifié les maux qui rongent le pays au plus profond jusqu’à l’entraîner dans un inévitable déclin :
- aucun n’a condamné le fonctionnement des institutions et rejeté le jacobinisme avec sa logique centralisatrice parisienne qui condamne les peuples allogènes à l’obéissance et à l’agenouillement permanents;
- aucun n’a dénoncé le colonialisme intérieur qui étouffe, vampirise et pompe l’énergie des régions et que dénonce avec force le philosophe Michel Onfray dans son dernier ouvrage titré : « Décoloniser les provinces » ;
- aucun d’entre eux n’a dénoncé le déficit démocratique chronique dont souffre ce pays. Le partage du pouvoir et la démocratie de proximité ne peuvent en effet s’exercer qu’à travers des parlements régionaux dotés de pouvoirs législatifs ;
- enfin, pas un seul ne s’est engagé, s’il était élu, à œuvrer à la reconnaissance des langues régionales, à leur enseignement ou à la ratification de la charte européennes des langues…
Au final, le seul choix qui s’offrait aux peuples allogènes de l’Hexagone se résumait à voter pour un jacobin de gauche ou un jacobin de droite, tous les deux étant partisans du pouvoir centralisateur. Ainsi le vote se limitait à choisir entre la schlague ou la chicotte !
L’Alsace n’a pas échappé à cette mascarade électorale, à ce Kàsperletheàter.
Elle n’a pas échappé à cette foire quinquennale aux promesses, dont on sait par expérience qu’elles ne sont jamais tenues. Chaque candidat se présentait comme le représentant des aspirations du « peuple français » !! Or tous ont superbement ignoré tant les récriminations du peuple alsacien - écœuré par l’effacement de la région Alsace décidé à Paris sans consultation de la population - que ses aspirations au respect et à la responsabilisation. Infantilisé par l’oligarchie parisienne, aidé en cela par la servilité affligeante de ses « Handlanger » locaux, le peuple alsacien ne peut décider pour lui-même : on lui inculque qu’il est incapable d’opérer ses propres choix et que courber l’échine est sa position naturelle !
Aux yeux de tous, il apparaissait clairement que l’Alsace était au rang du dernier de leurs soucis. De toute façon, étant ultra-minoritaires, dans ce système politique français injuste, totalement verrouillé et obstinément fermé à la proportionnelle, les Alsaciens en sont toujours réduits à devoir supporter les maîtres que d’autres, majoritaires dans le pays, leur imposent par leur vote. Les Alsaciens ne sont donc rien d’autre que des citoyens asservis : dans le système français, leur destinée est de subir éternellement les diktats de Paris élaborés par une petite clique de tyranneaux jacobins, tantôt de gauche, tantôt de droite, qui se relaient au pouvoir et décident et pensent à leur place !
A présent, de plus en plus nombreux sont les Alsaciens qui rêvent d’en finir avec cette servitude. Ils sont de plus en plus nombreux à ne plus rien espérer de cette République vermoulue, laminée par les affaires et les scandales politico-financiers qu’est aujourd’hui devenue la France. Le salut ne viendra pas d’elle ou de l’un quelconque de ses monarques républicains, « successeurs de Clovis » selon la formule de certains commentateurs des chaînes info, mais de leur propre détermination à faire le choix de l’émancipation, de la rupture. Pour eux, la France, avec son aristocratie d’élus coupés du peuple, son idéologie qui sent le rance et ses monarques républicains quasi divinisés qui entendent « incarner » le peuple, n’est plus la solution, elle est le problème ! Un problème que le vote ne pourra nullement résoudre : « Voter aujourd’hui, c’est choisir les modalité de son aliénation ; on ne peut pas choisir entre la peste et le choléra », constate Michel Onfray (1)!
Dans cette configuration, il est évident qu’aller voter ne pouvait que contribuer à maintenir au pouvoir une caste de profiteurs politiques qui font la loi et à légitimer un système dont l’aboutissement obligé n’est rien d’autre qu’une servitude volontaire : « Elections, piège à c… », scandaient les étudiants contestataires en mai 1968 ! Et puis, pour les Alsaciens, à quoi bon voter pour des candidats restés sourds à leurs doléances et qui ignorent jusqu’à l’existence même d’un peuple alsacien doté de droits reconnus par nombre de textes internationaux.
Les élections législatives vont suivre.
Et déjà, comme à l’accoutumée quand le bruit des gamelles se fait entendre, ça grenouille dur dans le marigot politique national et régional. Déjà on s’étripe pour l’attribution des circonscriptions : je te donne, tu me donnes…
En Alsace, les vieux chevaux de la politique locale, ceux qui par le passé ont déjà échoué et qui ont trahi leur mandat, celui de nous défendre, sont à nouveau sur les rangs. Rien ne change et la politique à l’ancienne a encore de beaux jours devant elle !! Ce sont d’ailleurs les mêmes qui nous ont envoyé sur les roses avec notre pétition contre la fusion, pourtant forte de 115 000 signatures d’électeurs, et qui nous demandent à présent de défendre la démocratie. Une incohérence qui ne les choque même pas.
Nombreux sont ceux qui flétrissent aujourd’hui le « système »… qui les a pourtant nourris depuis tant d’années. Mais ils savent aussi que la virulence de leurs critiques pourrait le cas échéant leur servir, une fois l’élection faite, pour mieux négocier un poste ou quelques prébendes en échange de leur silence, voire de leur ralliement à ce même système qu’ils viennent pourtant de tellement vilipender ! Accros au pouvoir, ces lions se feront agneaux et rentreront très vite dans le rang. Les Alsaciens ont à ce propos leurs expériences !
Alors que les vieux partis semblent imploser, ces élections seront pourtant une occasion unique pour les Alsaciens, après les bons scores d’Unser Land aux scrutins récents, de montrer leur opiniâtreté dans leur volonté d’émancipation et d’affranchissement de la mainmise parisienne ainsi que leur détermination dans la lutte pour l’autogestion régionale. Celles-ci passent évidemment par le vote en faveur des candidats protestataires alsaciens, pour le coup authentiquement « anti-système », qu’investira Unser Land. Le parti autonomiste devra s’imposer comme la machine de guerre qui convaincra nos concitoyens, rassemblera et structurera la lutte politique pour notre survie en tant que peuple. Les députés Unser Land qui seront élus à l’Assemblée seront la voix du refus alsacien, celle qui demandera des comptes à Marianne. Ils feront entendre enfin la voix du peuple alsacien : « Nein, mr mache einfach nemi met ! », sera leur credo. « Soyez résolus de ne plus servir et vous serez libres », écrit La Boétie !
Ce sera là l’enjeu principal des élections législatives à venir pour les autonomistes qui, pour l’emporter, devront entrer unis, sereins et déterminés dans l’arène électorale !
Le 12.5.2017
Bernard Wittmann – Historien
(1) Michel Onfray, « Décoloniser les provinces », éd. de l’Observatoire, mars 2017, p.11.
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Le 16.05.2017
L’auteur : B.Wittmann